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18 juin 2014 3 18 /06 /juin /2014 21:31

Le 9 décembre 2010, John E. du Pont meurt dans une prison de Pennsylvanie. Il s'y trouvait depuis plus d'une décennie après avoir abattu sans motif apparent son voisin et ami de longue date, Dave Schultz. Ce triste fait divers serait aujourd'hui totalement oublié si John du Pont n'avait pas été un millionnaire philantrope. Cette année a d'ailleurs été présenté au festival de Cannes un film, Foxcatcher, racontant l'histoire de ce meutre et des troubles mentaux de son auteur.

 

Quel rapport avec la philatélie ? John E. du Pont était également un collectionneur aguerri qui avait acheté en 1980 le seul exemplaire connu du célèbre 1¢ magenta de la Guyane britannique :

 

Mis en vente par Sotheby's, vente aux enchères du 17.06.2014, lot n° 1

Valeur estimée : 10 000 000$ à 20 000 000$

Prix de vente : 7 900 000$

 

Mis en vente par Robert A. Siegel Auction Galleries Inc., vente aux enchères n° 560 du 05.04.1980, lot n° 374

Prix de vente : 850 000$

 

Mis en vente par Robert A. Siegel Auction Galleries Inc., vente aux enchères n° 279 du 24.03.1970, lot n° 279

Prix de vente : 280 000$

 

Transaction privée, 1940

Prix de vente : 45 000$

 

Mis en vente à l'Hôtel Drouot par l'état français, vente aux enchères du 06.04.1922, lot n° 295

Prix de vente : 300 000F

 

Transaction privée, 03.10.1878

Prix de vente : 120£

 

Transaction privée, 1873

Prix de vente : 6 shillings

 

Achat au bureau de poste, 1856

Prix de vente :

 

ex Hunter, Vaughan, McKinnon, Ridpath, Ferrary, Hind, Hind Scala, Small,  Weinberg & Associates, du Pont

 

Ce timbre est suffisamment célèbre pour qu'on connaisse son parcours exact depuis sa « découverte » en 1873. C'est le jeune Louis Vernon Vaughan, 12 ans, collectionneur, qui découvre cet exemplaire dans la correspondance de son oncle. Il le vend 6 shillings afin d'acheter d'autres timbres pour sa collection. 

 

Quelques années plus tard, le timbre fait son chemin dans la faduleuse collection du comte von Ferrary, où il y restera jusqu'à la mort de ce dernier à Paris en 1917. Il lègue sa collection à l'état allemand mais dans cette période de guerre, la France se l'approprie et la met aux enchères quelques années plus tard, déduisant le résultat de la vente des réparations de guerre dues par l'Allemagne à la France.

 

Le timbre est déjà célèbre et de nombreuses anecdotes le concernant sont racontées. On dit qu'un particulier ayant déniché un second exemplaire aurait contacté Arthur Hind, l'acheteur de l'Hôtel Drouot, afin de lui vendre ce deuxième joyau. Celui-ci aurait acquis ce deuxième exemplaire authentique, aurait ensuite allumé son cigare et mis le feu au timbre en disant « Il n'y a qu'un seul 1¢ magenta » à son interlocuteur médusé...

 

Une contreverse naîtra également sur la possibilité que le timbre soit en fait un 4¢ modifié, hypothèse aujourd'hui rejetée. Pour le comprendre, il faut se pencher sur l'histoire postale de la colonie britannique. En 1850, les premiers timbres y sont imprimés de façon artisanale et un service postal intérieur est mis en place en mars 1851. Ce service a un essor fragile en raison de tarifs postaux inadaptés. Fin 1851, ces tarifs sont modifiés : 4¢ pour une lettre simple, 8¢ pour une lettre de moins d'une once (environ 30g) puis 4¢ pour chaque once supplémentaire. Les journaux, auparavant distribués gratuitement, devaient maintenant être affranchis d'un timbre de 1¢. La colonie commandera donc des timbres à une imprimerie de la métropole, d'une valeur faciale de 1¢ et 4¢, ce qui était suffisant pour les besoins d'affranchissement.

 

L'émission de 1852 fut remplacée par une troisième émission en 1853, émission qui durera jusqu'en 1859. Cependant, à l'automne 1855, l'île ne reçoit que 5000 exemplaires de chacune des valeurs alors qu'elle en attendait 50 000. Une nouvelle commande est immédiatement envoyé à l'imprimeur mais à cette ère où internet et l'avion n'existaient pas, il faudra pr-s d'un an pour recevoir la prochaine commande. Les stocks de timbres de l'île s'amenuisant, les autorités se sont résignées à imprimer une nouvelle émission avec les moyens locaux, d'où l'aspect assez brut et minimaliste de la rareté illustrée ci-haut et ce qui explique que le postier-maître ait demandé à tous ses commis de parapher chaque exemplaire de ces timbres, d'où les lettre EDW, pour Edmund Dalzell Wight, sur le 1¢ magenta.

 

Le timbre porte un cachet du 4 avril 1856, un vendredi. Justement, ce jour-là, The Official Gazette of British Guiana, qui paraît habituellement le mercredi et le samedi, publie un numéro spécial comportant deux proclamations du gouverneur de l'île. On peut donc imaginer que c'est ce numéro spécial qui sera affranchi et envoyé à Andrew Hunter, au domicile duquel son neveu découvrira le timbre 17 ans plus tard.

 

L'exemplaire offert à la vente n'est pas en très bonne condition mais on peut néanmoins affirmer que c'est le plus bel exemplaire connu puisque c'est le seul. Celui qui l'ajoutera à sa collection pourra, comme la plupart des précédents propriétaires, ajouter son cachet ou ses initiales au dos du timbre et passera à la postérité philatélique.

 

 

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